lundi 27 juillet 2009

Feuillet d'automne




Tout vient vers nous :
nous n'allons pas vers rien.
Vers où pourrions-nous aller ?
Toute marche est une simulation,
un jeu anodin
ou une coutume inutile.

Tout vient vers nous.
Depuis la terre silencieuse,
depuis le ciel que nous voyons
ou depuis le ciel que nous ne voyons pas,
depuis les os qui nous soutiennent
ou depuis le sang qui nous enveloppe,
depuis le temps que nous tentons d'aggripper
ou les nœds de hasard qui nous effleurent.

Tout vient vers nous.
La forme sous laquelle nous naissons,
la pensée et les ombres,
l'esquille de chaque parole,
les silences que nous articulons,
le rêve qui dépouille la nuit
ou la nuit qui dépouille le rêve,
l'appel inconnu et sans destin
que nous adresse tout amour.

Tout vient vers nous
sauf peut-être cette figure muette
que nous formons avec une nuance de chaque chose
et qui peut-être se dresse en nous ébranlant
pour faire route à son propre compte,
pour venir avec tout ce qui vient,
bien que qu'elle ne vienne pas vers nous.

Roberto Juarroz; Douzième poésie verticale; trad. de Fernand Verhesen; La Différence [Orphée], Paris 1993; poème no 38

vendredi 17 juillet 2009

Paris, Place d'Italie, le 29 juillet 2007


Il faut tomber et l'on ne peut choisir où.
Mais il est certaine forme du vent dans les cheveux,
certaine pause du coup,
certain angle du bras
que nous pouvons gauchir tandis que nous tombons.

C'est tout juste l'extrême d'un signe,
la pointe sans penser d'une pensée.
Mais cela suffit pour éviter le fond avare de quelques mains
et la misère bleue d'un Dieu désert.

Il s'agit d'infléchir un peu plus une virgule
dans un texte que nous ne pouvons corriger.

Roberto Juarroz; Poesía vertical, I, 17; Monte Avila Bueno Aires, 1988; trad. de Roger Munier (Fayard, Paris 1989)


jeudi 25 juin 2009

Illuminations




On voyage pour faire apparaître le monde et connaître avec lui, comme avec une femme, de trop brefs instants d'une indicible et totale réconciliation. Ces "illuminations" ne sont d'ailleurs pas le monopole de l'état nomade et peuvent aussi bien tomber comme foudre d'un ciel bleu sur l'ermitage d'un bonze ou la cellule d'un moine franciscain. Il y a des voyants qui n'ont pas besoin de parcourir le monde pour en apercevoir la structure, la palette, les harmoniques, son héraldique secrète. Il y a aussi des voyageurs voyeurs [...] auxquels il faut le déplacement dans l'espace, le prurit - curieux ou angoissé - de "l'autre côté de la montagne" pour que les écailles leur tombent des yeux.

Nicolas Bouvier; L'échappée belle, éloge des quelques pérégrins; Métropolis, Genève, 1996; p. 50

mardi 23 juin 2009

Miroirs




Ce feuillet est un (gauche) hommage à Pierre Alechinsky. Je l'ai copié comme un apprenti peintre se devait de le faire aux temps où le métier d'artiste était encore affaire d'artisans qui devaient forger leur regard et leurs gestes au contact des maîtres du genre.

Et, en artisan encore, j'ai exécuté ma copie de la main gauche comme Alechinsky qui se proclame gaucher. Cette mimétisme m'est d'autant plus naturel que j'ai longtemps exercé mes mains et mon esprit à la musique où la reproduction du geste physique est au coeur de l'enseignement au même titre que l'apprentissage de l'écoute, de l' "oreille musicale".

Me reflétant dans le miroir alechinskien, je pense aussi au dialogue analytique. Comme Freud quand il lit et paraphrase la Gradiva de Jensen. Il imite et interprète son modèle tout à a fois. Trouvant dans le balancement de la paraphrase et de l'explicitation le rythme propre de son herméneutique.

Et puis, étant dans un monde informatique autant que musical, j'ai généré l'image en miroir de mon dessin clin d'oeuil au contrepoint et et la fugue avec leurs thèmes inversés - comme remontant le temps.

Enfin, j'y ai apposé mon sceau au rouge des sceaux chinois.

lundi 22 juin 2009

Quai du Seujet, Genève, 14 juillet 2007



Ce jour là, en me promenant au coeur de Genève traversé par le Rhône, j'ai traversé le barrage au fil de l'eau du quai du Seujet. Mon regard à été capté par l'architecure de cette construction qui fait si clairement ressentir l'effort de retenir l'eau et de la laisser courir tout à la fois pour en retirer la précieuse énergie électrique - cette fée implacable de nos technologies et de nos modes de vivre.

A l'ombre des imposants bâtiments qui bordent ce barrage, j'ai tenté de retenir cette image mêlant la brutalité du métal à la rafraichissante atmosphère de l'onde bouillonnante.
 

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